Marie Reynès-Monlaur

Pages de deuil et d’héroïsme: Les Paroles secrètes (extrait).  Paris: Plon-Nourrit, 1915. 

… je ne peux pas les regarder sous cet angle, comme des bandits ou des bourreaux. Autant je les repousse comme Française, autant je les admire au point de vue de l’esprit. Vous savez le mot d’un de nos maîtres: “L’Allemagne, la seconde patrie de tout être qui étudie et qui pense.”

Pages de deuil et d’héroïsme: Les Autels morts (extrait).  Paris: Plon-Nourrit, 1917.

Mais mon premier maître, c’est moi-même …. Le Christ n’intervient que dans la mesure où je le juge bon. C’est le seul gain — ou le seul maléfice — que je conserve de l’Allemagne. Et je ne puis pas parler autrement que je ne pense. 

C’est une sensation si nette que cette guerre est une guerre de dieux! Malgré notre gouvernement athée, la France est ici avec ses grands instincts chrétiens, la générosité, la bonté, la pitié! Devant l’adversaire brutal elle garde le caractère chevaleresque que quatorze siècles d’amitié avec le Christ lui ont donné. On sent cela, dans ce corps à corps, comme on sent la vie. 

Pages de deuil et d’héroïsme: La Fin de Claude (extrait).  Paris: Plon-Nourrit, 1918.

Du sol se levait une poussière aveuglante, si dense que l’on crut d’abord à des gaz asphyxiants. Des débris humains s’entrechoquaient au travers. Les épargnés eux-mêmes, près du chœur, poussaient des hurlements de folie… Les Allemands avaient choisi ce jour et cette heure — le Vendredi Saint à trois heures — pour étonner le monde par un des traits de leur culture. Ils rendaient inoubliable, ainsi, l’un des crimes significatifs de leur race. L’obus avait brisé un pilier, entraînant la voûte.

Dieu l’avait entendue, exaucée, dépassant ses espérances et comblant les désirs de son coeur. Son offrande était acceptée. Son sang servirait à la rançon de cette France qu’elle avait aimée plus qu’elle-même, au baptême de l’âme chérie qu’elle remettait aux mains de Dieu sous cette aspersion héroïque.