Nancy Sloan Goldberg, Ph.D.

French ImageProfessor of French and Women’s Studies, Émerite
Department of World Languages, Literatures and Cultures
Middle Tennessee State University
Nancy.Goldberg@mtsu.edu

Écrivains français de la Grande Guerre

En 1914, le gouvernement français enjoint à toute la population civile de participer à la défense du pays. Il réserve une fonction grave et précise aux hommes et aux femmes de lettres en les invitant à influencer l'opinion publique sur la guerre. Des écrivains et écrivaines célèbres répondent à l'appel officiel avec enthousiasme, livrant quantités d'essais, récits personnels, études d'économie et d'histoire militaires, tout autant que de poésie, nouvelles, pièces de théâtre et romans. Parmi les best-sellers de cette période sont Histoire de Gotton Conixloo, 1918, (Grand Prix du Roman de l’Académie Française) de Camille Mayran,  La Guerre, Madame 1916 de Paul GéraldyA travers le tourment : une vie intime, 1917 de Mathilde Démians d’Archimbaud (Prix Jules Davaine de l’Académie Française), Âmes de guerre, âmes d’amour, 1917 (Prix Montyon) de J. Delorme Jules-Simon (petite fille du célèbre académicien), Gaspard de René Benjamin, et  La Flamme au poing de Henry Malherbe, ces deux derniers couronnés du Prix Goncourt en 1915 et 1917. Même l’écrivain célèbre espagnol, Vicente Blasco Ibáñez répond à l’appel du Président de la République Raymond Poincaré, et son best-seller mondial, Los Quatro Jinettes del Apocalipsis est le sujet de mon essai “Nationalism, Sin, and Redemption in The Four Horsemen of the Apocalypse and its American Film Adaptations” in Mnemosyne and Mars: artistic and cultural representations of Twentieth-Century Europe at War (éd. Peter Tame).

Les romans d’après-guerre de deux de ces soldats-écrivains, Jean Valmy-Baysse et Roland Dorgelès, se concentrent sur la démobilisation et les réalités difficiles abordées par les vétérans au cours de leur réinsertion sociale. Dans Le Retour d’Ulysse (1921) et Le Réveil des morts (1923), Valmy-Baysse et Dorgelès racontent respectivement la fraude et l’hostilité qui attendaient le retour des poilus, plutôt que la chaleur et la gratitude qu’ils anticipaient. (Voir mon essai "Gratitude : A Different Kind of War Reparation." Lingua Romana 13.1). 

En 1914 les premiers récits de guerre établissent la valeur fondamentale du témoignage direct, qui leur accorde une autorité morale distincte comme source unique de la vérité sur le combat. Dans l’essai “From Barbusse to Lemaitre: The Evolution of Experience” Anglica 27.3, j’analyse le passage du temps qui entraîne un changement dans la compréhension du concept du témoignage direct et crée ainsi une occasion pour les écrivains de la “post-mémoire”, en particulier des auteur.e.s de la fiction populaire, d’aborder des sujets absents et récupérer des histoires cachées.  

Les Écrivain.e.s

De nos jours, la plupart de ces textes, malgré leur renommée considérable et leur succès de librairie, sont rejetés comme de simples ouvrages de propagande sans valeur littéraire, à l'exception de quelques romans des soldats-auteurs, parmi lesquels, Le Feu d'Henri Barbusse, (Prix Goncourt 1916), Les Croix de bois de Roland Dorgelès (Prix Fémina 1919), et  La Vie des Martyres, 1917 et Civilisation 1914-1917 (Prix Goncourt 1918) de Georges Duhamel. Depuis une trentaine d’années, je me consacre à la tâche de faire ressortir de l’oubli les œuvres d’autres auteurs de la Grande Guerre, surtout des romancières et des poètes pacifistes. Ces auteur.e.s sont des gens de lettres accompli.e.s dont les œuvres leur valent de nombreux prix pendant leurs carrières, pourtant leurs traces restent difficiles à trouver. Ce site se voue à transmettre aux lecteurs et lectrices d’aujourd’hui les renseignements nécessaires pour découvrir les artistes littéraires afin de leur apporter la reconnaissance qui est leur droit. Mon livre, Woman, Your Hour is Sounding: Continuity and Change in French Women’s Novels of the Great War, (St. Martin’s Press) présente une quarantaine de romans et de contes publiés pendant la guerre. Il tient à analyser le style fictif et littéraire dont les romancières se servent pour montrer comment leurs personnages vivent la guerre, ainsi que l’impact des changements dans la vie sociale et particulière de la Française de l’époque. Voir la liste ci-dessous.

L’essai, «Women, War and H. G. Wells : the Pacifism of French Playwright Marie Lenéru » publié dans War, Literature and the Arts, 14, analyse les idées internationalistes du célèbre écrivain anglais et l’interprétation en fait par Lenéru dans sa pièce pacifiste de 1917, La Paix.  Le chapitre « French Women Poets Respond » dans le recueil, Beyond Modern Memory: The Literature of the Great War Reconsidered, (éd. Patrick Quinn et Steven Trout), critique le développement des définitions différentes d’amour qui entremêlent la poétique et la politique dans les poèmes de Anna de Noailles, qui supporte la guerre, Noélie Drous et Henriette Sauret, toutes les deux y opposées, et Cécile Périn, dont les opinions sur la guerre vacillent. Le chapitre « Les Femmes, le civil, et le soldat dans les romans de la Grande Guerre » dans la collection Les Femmes Écrivent la Guerre (éd. Frédérique Chevillot et Anna Norris), analyse la manière que les hommes et les femmes de lettres, tels que Colette Yver, Henri Barbusse, Lucie Delarue-MardrusRoland Dorgelès, et Camille Marbo (pseudonyme de Marguerite Borel), entre autres, appréhendent leur devoir patriotique et la question de la conduite des Françaises pendant la guerre 14-18. Le rôle primordial joué par Borel dans le recrutement, la formation, et la fidélisation des employées pendant la guerre est examiné dans "Marguerite Borel/ Camille Marbo: the government's feminist,” un chapitre dans French and francophone women facing war/Les Femmes face à la guerre, (ed. Alison Fell). L'essai “Qui donc fermera la porte entr’ouverte? ”: the Home and the Nation in Women’s War Poetry” dans Essays in French Literature and Culture 51 augmente mon travail sur la poésie française de guerre par une analyse des thèmes concurrents de foyer et de patrie dans les textes de plus d’une vingtaine de femmes poètes, y compris Jean Balde (Jeanne Alleman), Jeanne Perdriel-VaissièreHélène Picard et Marie-Paule Salonne (voir ci-dessous)

Malgré l'appel lancé par le gouvernement aux écrivains pour soutenir l'effort de guerre, des écrivains français lèvent-ils la plume pour endiguer la vague de militarisme qui déferle sur l'Europe ? Dès les premiers jours de la guerre, Romain Rolland, l’auteur français contemporain le plus connu au monde, s'oppose à la guerre. Ses essais dans Le Journal de Genève, commençant par "Au-dessus de la mêlée" (1914) lui apportent à la fois une admiration et une dérision intenses. En tant que seule voix publique contre la guerre, Rolland inspire et encourage les autres à imiter sa position courageuse, et malgré le danger dû à la censure pendant la guerre, beaucoup répondent à son appel par la poésie et la correspondance. Cette poésie figure dans mon "' Une grande âme n'est jamais seule' : la réception poétique contemporaine d'Au-dessus de la mêlée" dans Centenaire d'Au-dessus de la mêlée de Romain Rolland. (éd. Landry Charrier et Roland Roudil). Si peu de gens connaissent aujourd’hui ces œuvres qui témoignent de l’opposition croissante à la Grande Guerre, les poètes anti-guerre participent à la campagne énergique pour galvaniser l’opinion publique en faveur de la paix. Ils tentent de transmettre un moment historique distinct par les moyens qu’ils connaissent le mieux : la poésie. Leurs images sont puissantes, leur langage brûlant, révélant la clarté d’une vision et la force d’une résolution. Mon livre En l’honneur de la juste parole, la poésie française contre la Grande Guerre, demeure l’analyse et la présentation les plus complètes des vers français écrits par plus de cinquante-cinq poètes en opposition à la Première Guerre mondiale. (voir la liste ci-dessous; il me reste quelques exemplaires de ce livre épuisé. Merci de me contacter pour en savoir plus.)

Les Précurseurs: Hugo, Wagner, Tolstoï, et Whitman; l’Abbaye de Créteil

Leur opposition à la guerre lance les carrières longues et distinguées de nombreux poètes, mais pour des autres, comme Charles Vildrac et Henri Guilbeaux, la guerre de 14-18 n’est qu’un catalyseur pour mieux amplifier une esthétique humaniste déjà présente dans leurs écrits et leurs activités d’avant guerre. Tout comme leurs héros Hugo, Wagner, Tolstoï, et Whitman pour qui la vie est indissoluble de toute forme d’art, et également inspirés par des activistes anarchistes et socialistes de l’époque, la jeune génération créatrice de l’avant-guerre veulent que leurs poèmes témoignent de l’unité de toute chose vivante et de la fusion de l’idéal et du concret. Pour les poètes antimilitaristes, pareils aux autres jeunes artistes et écrivains, la Beauté n’est que la symbiose de l’essence spirituelle et de la présence organique de l’humanité entière. Mon essai, « Charles Vildrac : Nothing is Lost from a Loving Heart, » publié dans Focus on Robert Graves and His Contemporaries, analyse la poésie de Vildrac au sein de sa conviction que l’art est l’expression la plus parfaite de la vie moderne. Ses poèmes manifestent une connaissance profonde et intégrale de la guerre, tout en se concentrant sur les sonorités et l’énergie des paroles pour nous dévoiler une vraie synthèse aux faces multiples. Tandis que Vildrac souligne la capacité de chaque individu de réaliser lui-même un univers harmonieux, Henri Guilbeaux se consacre à l’action collective chère aux syndicalistes et communistes de l’époque. Dans « From Whitman to Mussolini : Modernism in the Life and Works of a French Intellectual », publié dans le Journal of European Studies, une analyse de la poésie et de l’activisme politique de Guilbeaux éclaire la fusion moderniste de l’esthétique artistique et du changement social.

Deux articles examinent la traduction en action de cette Weltanschauung unifiée de vie et d’art par ceux qui seraient plus tard opposés à la Grande Guerre. Dans « Nietzsche contre Hugo : l’Individu, la Communauté et l’Abbaye de Créteil », Studi Francesi, j’examine les premiers poèmes publiés (1905-1908) des écrivains célèbres de l’Abbaye, Georges Duhamel, Charles Vildrac et René Arcos, dans le contexte de leur vie communale journalière partagée avec des artistes Albert Doyen, Albert Gleizes, Henri-Martin Barzun, et Alexandre Mercereau. Un article paru dans le French Review, 65.5, « Unanimism in the Concert Hall : Les Fêtes du Peuple, 1919-1939 » évoque les tentatives axées sur les milieux populaires du compositeur Albert Doyen pour répandre chez les classes laborieuses les connaissances musicales, en faisant éclore l’énergie inutilisée de tous ceux qui sont traditionnellement exclus des performances musicales

Poètes et Artistes Anti-Militaristes

Écrivaines

Poètes

  • Jean Balde 
  • Baronne de Baye
  • Adrienne Blanc-Péridier
  • S. Boutet-Lagrée
  • Marguerite Burnat-Provins
  • Henriette Charasson
  • Virginie Demont-Breton 
  • Noélie Drous
  • Marguerite Duportal 
  • Madeleine Le Chevrel
  • Marie Le Franc 
  • Amélie Murat 
  • Berthe de Nyse
  • Jeanne Perdriel-Vaissière
  • Cécile Périn
  • Hélène Picard 
  • Marie-Paule Salonne
  • Henriette Sauret
  • Louise Simard
  • Jeanne Valcler
  • Madeleine Vernet
Maurice Pottecher
Maurice Pottecher (à gauche) et Marcel Martinet
 
Henriette Sauret 
Henriette Sauret en 1948
 
Paul Vaillant-Couturier 
Paul Vaillant-Couturier (à gauche) en 1915